Pour le groupe de médias américains Americian Media Inc (AMI) éditeur du National Enquirer, on est clairement en mode « communication de crise ».

Le PDG d’Amazon, Jeff Bezos, a révélé jeudi que des courriers électroniques lui avaient été envoyés par le National Enquirer et le menaçait de publier des photos où on le voit nu, ainsi que des échanges de SMS avec sa maîtresse, s’il ne mettait pas fin à son enquête sur l’entreprise de presse.

La nuit a été rude

Selon Techcrunch, la nuit a été rude pour AMI. La société a publié une brève déclaration défendant sa communication et son comportement avec le PDG d’Amazon, Jeff Bezos.
Elle a affirmé avoir «agi légalement» dans ses reportages sur Bezos et avoir engagé des «négociations de bonne foi» avec lui. Malgré ces affirmations, le groupe a déclaré avoir ouvert une enquête sur cet incident.

Ce ton feutré cache mal que les dégâts sont importants pour ce groupe de médias apparemment déjà en difficulté.
Le PDG d’Amazon expliquait en effet dans un article de blog jeudi qu’il avait découvert que ce groupe cherchait précisément à se désendetter en faisant la danse du voile auprès de l’Arabie Saoudite et de son chef MBS (Mohamed Ben Slamane). Ceci au pire moment : lors de la découverte de l’assassinat du journaliste Jamal Kashoggi à Istanbul.

Le fait que le PDG d’Amazon ait découvert cela aurait particulièrement agacé les dirigeants d’AMI, suscitant, aux dires de Bezos, la tentative « de chantage ».

Déjà sous observation

Le problème pour AMI, c’est que le groupe était déjà sous l’observation attentive de la justice américaine. Dans l’affaire des call-girls, dont le candidat Trump a acheté le silence pendant la campagne électorale et où Michael Cohen, son ex-avocat, a révélé sous serment être aux manettes de l’opération, conscient des dégâts qu’auraient pu faire la publication des déclarations des jeunes femmes, AMI a été éclaboussé.

Le groupe a admis en effet avoir versé 150 000$ à Karen Mc Dougel, l’une des deux jeunes femmes, en lien avec la campagne de Trump, afin qu’elle garde le silence. Le 20 septembre dernier, un accord a été conclu par le groupe avec les procureurs fédéraux de New York, en vertu duquel l’entreprise est censée « s’abstenir de toute activité illégale pendant trois ans ».

La formulation peut paraître étonnante, puisque s’abstenir de toute activité illégale semble la moindre des choses pour tout un chacun, mais il faut lire la chose à l’envers.

Au cas où l’une de ses activités se révélerait « criminelle », l’entreprise serait poursuivie automatiquement pour les autres griefs contre lesquels elle bénéficie, en vertu de cet accord, de l’immunité. En clair : c’est du sursis à l’américaine.

Le chantage, est-ce criminel ?

Si le « chantage » envers Jeff Bezos est avéré et relève d’une qualification proche du « crime » (à New York chantage et extorsion de fonds sont des « crimes » passibles d’une peine de prison), la société sera donc automatiquement coupable, en plus, de « parjure et d’obstruction à la justice« .

Les chaines de télévision américaines font déjà leur miel de l’affaire. Les avocats spécialistes viennent sur Fox News expliquer qu’il ne peut s’agir de crime, puisque la publication d’informations sur l’intimité d’un homme aussi puissant relèvent du droit à l’information le plus strict.

Les arguties dont on peut voir les premières salves ici ne font que commencer, mais une chose est certaine : en se défendant personnellement d’une manière aussi inattendue, Bezos vient de mettre un pavé dans une sacrée mare.