A quelques jours d’intervalle, le célèbre Jack Dorsey, fondateur et PDG de Twitter, a répondu à deux interviews. L’une sur la chaine YouTube PowerfulJRE, où, face à Joe Rogan, l’intervieweur, il dévoile ses réflexions sur l’évolution des règles du jeu de Twitter, et, en premier lieu, sur la possibilité ou pas, de pouvoir modifier ses tweets, une fois qu’ils ont été émis. C’est l’interview la plus récente, mise en ligne le 2 février. Elle tourne autour de la grande question : « pourra-t-on un jour modifier des tweets déjà publiés ? ». Un grand sujet, sur lequel on l’interroge régulièrement.

L’autre interview, il l’a donnée au magazine Rolling Stones, le 25 janvier dernier. Il y raconte une anecdote étonnante au sujet de Mark Zuckerberg, le patron de Facebook.

« Il y a eu une année où il ne mangeait que ce qu’il tuait », raconte Jack Dorsey à propos de « Zuck ». En 2011, en effet, le patron de Facebook s’était lancé ce défi. Une idée originale qui l’a conduit à devenir végétarien. Et, avant cela, à servir à Jack Dorsey lors d’un dîner, une chèvre qu’il venait de tuer sous les yeux de son invité.

La question est donc  : comment Jack Dorsey pourrait à l’avenir raconter cette anecdote en suivant les nouvelles règles auxquelles il réfléchit pour Twitter ?

Les tweets deviendraient éditables

C’est la principale information de l’interview avec Joe Rogan. En clair, une fois que l’on a créé son Tweet, on pourrait le modifier ensuite. Seulement voilà, pas question de détruire complètement la première version. Celle-ci resterait toujours accessible.
L’argument développé consiste à dire qu’il ne faut pas que les harceleurs puissent commettre leur forfait et modifier aussitôt leur tweet en mode « ni vu-ni connu ».

En revanche, pour ce qui est des conséquences du tweet impulsif, cela ne changera pas grand chose.

Ainsi, pour dans le cas de notre exemple, Jack Dorsey devra continuer de faire bien attention à ses adjectifs. Comme tous les utilisateurs de Twitter.
Exactement comme dans l’interview de Rolling Stones dont on peut supposer qu’elle été dûment relue par ses attachés de presse.

Quand il dit : « Nous allons dans la salle à manger et il sert la chèvre. C’était froid. C’était mémorable », on peut supposer que dans la version parlée il a dû dire quelque chose comme « Là, il sert la chèvre. C’était froid. C’était épouvantablement dégueulasse ! »

De quoi se fâcher avec Zuckerberg très fort.
L’exemple-même du tweet à éviter. En lieu et place, l’adjectif « mémorable » sonne étonnamment « politically correct » au regard du reste de l’anecdote.

Une présence d’esprit remarquable, que n’ont pas ceux dont les tweets provoquent si souvent le scandale. Alors pourquoi, justement, ne pas donner plus de temps pour que cette présence d’esprit puisse se répandre auprès du plus grand nombre ?

Pourquoi en pas pouvoir modifier son post, comme sur Facebook ?

« La raison pour laquelle nous n’avons pas créé d’éditeur dès le début, explique Dorsey sur YouTube, c’est que nous avons été construits selon une philosophie proche de celle du SMS. Une fois qu’on a envoyé un texto, on ne peut plus le récupérer. Un Tweet, c’est la même chose. »

On pourra répliquer qu’un texto s’adresse rarement au monde entier, alors qu’un Tweet si.
Nuance qui est précisément à l’origine des grands débats qui concernent Twitter, les fake news et les tweets « qui ont dépassé leur pensée ou n’ont pas tenu compte du contexte » que toutes les personnalités cherchent à corriger.

Un argument qu’entend Dorsey, apparemment, puisqu’il tourne autour du sujet depuis un moment.
De là à remettre en question la base du microblogging, il y a un pas que Dorsey accepte de franchir pour la première fois… mais pas plus de 30 secondes.

« Nous pourrions introduire un délai de 5 à 30 secondes pour l’envoi, explique-t-il. Et pendant ce laps de temps, les corrections pourraient être faites. »

La question du contexte

Pas plus. Il n’est pas question pour autant de changer la nature de la plateforme et toute sa philosophie.
Il argumente : « Si vous êtes dans le contexte d’un match de NBA, vous voulez être rapide et dans le moment présent.  »

Dans le cadre de notre exemple, donc, les Tweets auraient correspondu aux phrases courtes de l’interview à Rolling Stones : « Il avait six chèvres à l’époque. Je lui demande : « on va manger la chèvre que tu as tuée »? Il a dit « Ouais ». (86 caractères : on peut même ajouter des hashtags).

Puis, quelques minutes plus tard : « Je demande à Mark Zuckerberg : « avec quoi va-t-on la manger ? » « De la salade » (64 caractères).

Et enfin le fameux : « Il sert la chèvre. C’était froid. C’était mémorable. Je ne sais pas si elle retournée dans le four, j’ai juste mangé la salade. »

Morale de l’histoire

Il ajoute sur YouTube :  » Si vous souhaitez commenter ce que le président vient de faire vous avez besoin de plus de temps, et nous pouvons sans doute être innovateur sur cet aspect-là ».

Autrement dit, il cherche encore le moyen de créer des « tweets » dont la rédaction exige réflexion, ou un pas de recul.

Des tweets qui seraient au fond quelque chose comme une morale de l’histoire.
Par exemple : « Comment faire manger de la salade à ses invités «