C’est le média TheInformation qui a révélé cette histoire. Quelques jours avant la collision mortelle entre un véhicule autonome de Uber et une cycliste en mars dernier dans l’Arizona, un cadre de la boite avait notifié des problèmes. Robbie Miller, gestionnaire des opérations concernant les voitures autonomes, avait écrit un mail de plus de 800 mots à sa hiérarchie. Il y dénonçait le manque de formation des chauffeurs et d’études sur les accidents préalables.

Plusieurs mois après le drame, on apprend donc que Uber avait redoublé de maladresses quand à sa gestion des risques. Dans son mail de mars, Miller dénonce les mauvais comportements de l’opérateur, responsable des incidents (légers) qui avaient déjà eu lieu. Par ailleurs, il pointait le manque de formation de certains chauffeurs et la nécessité du retour d’un système à deux conducteurs. Si le leader du VTC l’avait écouté, l’accident n’aurait très probablement pas eu lieu. En effet, l’enquête de police avait révélé que la conductrice était en train de regarder The Voice sur son smartphone au moment de l’incident. Par conséquent, une deuxième personne, alerte, aurait pu corriger la trajectoire et éviter la collision.

Cette information met Uber en grandes difficultés à l’aube de son entrée en bourse. La compagnie américaine, malgré son fort chiffre d’affaires, peine à engranger des bénéfices, et les véhicules autonomes sont une des clés pour résoudre le problème. Si elle perd la confiance de ses utilisateurs sur ce service, le rêve d’un modèle économique viable risque de s’envoler définitivement.

D’autant que malgré la responsabilité de la conductrice, la diffusion du mail de Robbie Miller a permis de découvrir une forte tendance à l’accident chez les véhicules autonomes de Uber avant l’arrêt de leur circulation. Ils frappaient des objets tous les 10000 km et un véhicule était endommagé tous les deux jours au début de l’année. De plus, les chauffeurs devaient en reprendre le contrôle tout les kilomètres et demi, et un accident sérieux était évité de justesse tout les 60 km. Cela ne semblait pas s’arranger avec le temps, au contraire.

Par ailleurs, Robbie Miller a reproché à l’entreprise de VTC d’avoir agrandi beaucoup trop vite sa flotte de voitures. Un cinquième de sa proportion aurait largement suffit à récolter les informations nécessaires à son perfectionnement selon lui. Une information d’autant plus regrettable quand on sait que Uber mettait parfois deux semaines à analyser des accidents, et que l’un d’entre eux était même passé entre les mailles du filet avant que Robbie Miller ne le fasse remarquer.

Malgré tous ces problèmes, The Information incrimine le directeur de la division véhicules autonomes, Eric Meyhofer, comme principale source des défaillances techniques. Il aurait eu trop confiance en le nombre de kilomètres parcourus (2 millions) par ses voitures, ce qui n’est pas forcément gage de qualité. Quoi qu’il en soit, Uber semble au moins avoir retenu la leçon. On sait que l’entreprise prévoit de reprendre ses tests très bientôt, mais un porte-parole a annoncé que cela se ferait uniquement lorsque les principales mesures recommandées par Miller auront été adoptées. Cependant, on est en droit de se demander si cela sera suffisant pour remonter la pente. Outre sa culpabilité dans un accident, ses concurrents ont désormais pris une large avance. Waymo a lancé sa première offre commerciale, tandis que l’autopilote de Tesla continue d’évoluer.