Une équipe de chercheurs travaillant au sein d’IBM Research a élaboré une intelligence artificielle qui peut prédire des réactions chimiques. Cette création pourrait révolutionner bien des industries.

Pour arriver à créer de programme, les 5 IBMers ont eu une approche relativement surprenante. En effet, ils ont appliqué la compréhension du langage à l’association d’éléments chimiques.

« Cela peut paraître surprenant au premier abord, mais il y a des similarités entre un langage et la chimie. Voici quelques examples pour être plus concret.
– La distribution des deux sets de données suit une loi de Zipf.
– Un groupe fonctionnel d’un côté d’une molécule peut influencer sa réactivité tout comme un mot d’une phrase peut influencer son sens. Cette dépendance à longue distance (long range dependancy) influence le type de modèle que nous pouvons utiliser.
– Si on change un atome dans une molécule elle n’aura plus la même réactivité. L’équivalent dans une langue ce serait la négation. Aussi nous avons utilisé une représentation des molécules qui est textuelle. Cette représentation est appelée SMILES
, » a précisé Théophile Gaudin, un des chercheurs ayant travaillé sur le projet, à Siècle Digital.

molecule cafeine

Voici une molécule de caféine, « elle correspond dans cette représentation à Cn1c(=O)c2c(ncn2C)n(C)c1=O En conséquence, avec ces similarités et le fait que nos données sont sous un format textuel, il nous a semblé naturel de nous tourner vers un modèle de traduction. »

Imaginez que pour le processus de création d’un médicament, il faut compter de très nombreuses étapes pour arriver à constituer un produit stable. En général il y a entre 30 et 40 étapes pour la conception d’un médicament. Cela pourrait donc révolutionner l’industrie pharmaceutique,
« Et pas seulement l’industrie pharmaceutique : les outils que nous développons pourront servir à tous les chimistes faisant de la synthèse. En effet, les chimistes spécialisés dans la synthèse sont souvent des experts dans un type de réaction bien précis et non des généralistes. Notre outil pourra leur permettre d’étendre leur expertise à un plus vaste domaine de la chimie. Nous ne cherchons pas à remplacer l’humain par la machine, mais nous voulons augmenter les capacités de l’humain grâce aux machines.

Les implications de tels outils pourraient changer la façon dont on fait des découvertes. On fait beaucoup de recherche à ce sujet en ce moment à Zurich. Il n’est pas toujours évident pour un scientifique d’être à jour avec toute la littérature dans son domaine. Nous travaillons donc sur des outils qui, dans un premier temps, ingèrent ces données, c’est l’étape « knowledge extraction ». Et dans un deuxième temps, nous exploitons ces données de différentes manières. Notre dernier papier est un bon exemple de ce qui peut être fait, » a conclu Théophile Gaudin.

Vous l’aurez compris, les possibilités sont nombreuses avec un tel outil. Son objectif n’était pas du tout de remplacer les chimistes, mais plutôt de les aider à mener à bien leurs travaux. Pour l’instant le programme offre des prédictions précises à dans 80% des cas. La prochaine étape c’est la mise à disposition de l’outil en tant que service cloud, et dépasser les 90% de précision.