L’univers du B2B est absolument passionnant. Sa diversité, sa richesse et la densité de ses problématiques m’impressionneront toujours. Cela est d’autant plus vrai dans le domaine du numérique, où l’écosystème B2B est en mutation permanente : les industries AdTech et MarTech en sont un bon exemple.

Les technologies et les comportements des acheteurs évoluent à vitesse grand V, en B2B comme en B2C. Pour ne pas se faire prendre de court, il est donc indispensable de s’informer quotidiennement afin d’anticiper les nouvelles tendances technologiques, de s’adapter aux comportements des consommateurs, et d’actualiser ses bonnes pratiques.

Seulement voilà : en B2B, avec la démocratisation du Content Marketing, la production de contenus est devenue un véritable outil promotionnel et commercial. Si bien qu’au fil du temps, la monétisation des contenus et leur utilisation à des fins marketing ont considérablement dégradé la qualité de l’information B2B.

Je dresse ce constat à partir d’un ressenti personnel : le matin, lorsque j’arrive au bureau, j’effectue une veille sur les thèmes de l’e-commerce et du webmarketing. Depuis une dizaine de mois, j’ai de plus en plus de mal à trouver des informations objectives, des contenus de qualité et des articles de fond. À l’inverse, la proportion de contenus bullshit dénués d’intérêt est grandissante. Médias, entreprises, blogueurs… tout le monde est concerné par ce nivellement vers le bas.

Alors le Content Marketing est-il en train de tuer l’information B2B ?

Côté médias : le Content Marketing pour survivre économiquement

Avec l’avènement du numérique, la presse écrite a dû faire face à une concurrence d’un nouveau genre : les médias pure players. Son business model de rémunération à l’abonnement et de publicité print est devenu insuffisant pour survivre. Deux options s’offraient alors aux médias de presse écrite : se numériser ou décliner.

Pendant un temps, les médias qui se lançaient sur Internet n’ont fait que reprendre le modèle d’abonnement de la presse écrite pour le transposer au web. Mais d’autres acteurs ont fait le choix d’adopter un modèle économique 100% publicitaire. Les blogueurs sont aussi venus apporter leur grain de sel, en captant une partie de l’audience des médias historiques. Enfin, certaines sociétés B2B se sont également mises à produire des contenus pour partager leur expertise, notamment via des blogs d’entreprise.

Résultat de toutes ces évolutions : les internautes ont pris l’habitude d’accéder gratuitement à des contenus B2B de qualité, rendant obsolète tout business model basé sur l’abonnement payant. La vente d’espaces publicitaires est donc devenue la principale source de rémunération des médias… jusqu’à la montée en puissance des adblockers.

Or, de plus en plus d’entreprises B2B exprimaient le besoin d’être visible et de faire valoir leur expertise sur le web ! Les médias ont donc commencé à bâtir des offres publicitaires dédiées aux annonceurs B2B basées sur le Content Marketing. Une source de revenue fiable et non impactée par les bloqueurs de publicité. Oui, mais au détriment de la qualité du contenu ?

Typologie des contenus promotionnels dans un média B2B

Entendons-nous bien, certains contenus promotionnels peuvent être de très bonne qualité, sinon le Content Marketing n’aurait jamais connu le succès qu’il rencontre aujourd’hui.

D’ailleurs, sur quels critères peut-on évaluer la qualité d’un contenu promotionnel ?

  • Du point de vue de l’entreprise, un contenu promotionnel de qualité est un contenu générateur de résultats. Il doit donc être ROIste, valoriser l’expertise ou les produits de la marque, être viral, ou encore générer du trafic sur le site corporate.
  • Du point de vue du lecteur B2B, un contenu de qualité (promotionnel ou non) est un contenu dont on ressort grandi par la lecture. Il aura décrypté des tendances, abordé des sujets de fond, répondu à des questions d’actualité ou encore dévoilé des conseils à suivre pour atteindre ses objectifs.

Un contenu promotionnel doit donc à la fois servir les intérêts de l’annonceur et du lecteur. Cet équilibre est difficile à trouver, mais il doit être respecté. Un contenu trop publicitaire (dans la forme ou dans le fond) rebutera le lecteur et deviendra ainsi totalement contre-productif pour l’entreprise.

Dans les médias B2B, on retrouve plusieurs types de contenus promotionnels :

    • L’article sponsorisé : il est rédigé par un journaliste sur un thème choisi par l’annonceur ou sur l’entreprise elle-même. Souvent, l’annonceur valide le contenu avant sa publication.
    • Le publi-rédactionnel : il est directement rédigé par l’annonceur selon les consignes données par le média (longueur, ton, nombre de liens…), et est prêt à être publié tel quel au nom de la marque sur le site du média.
    • La tribune : il s’agit d’une prise de parole dans le média d’un dirigeant ou d’un membre de l’entreprise, souvent sur un sujet d’actualité.
    • La promotion de livre blanc : l’annonceur fait la promotion d’un ebook sur le site du média. Ce contenu est accessible via un formulaire de téléchargement. L’annonceur récupère ensuite les contacts générés par le formulaire.
    • La promotion d’événements : certaines entreprises B2B organisent leurs propres événements et en font la promotion sur des médias en ligne afin de maximiser leur nombre d’inscriptions.
    • La promotion d’infographie : format très utilisé par les annonceurs en B2B, l’infographie synthétise les résultats d’une étude et/ou des informations essentielles sur une thématique. Ce format est souvent très apprécié des lecteurs.
    • L’interview : un journaliste réalise une interview d’un membre de l’entreprise pour évoquer ses produits, sa valeur ajoutée, ou encore pour rebondir sur l’actualité. Certains médias vendent ces interviews en « pack » : la personne interviewée (souvent le CEO) apparaîtra donc à plusieurs reprises dans le média pour aborder divers sujets – tous en lien avec son business – et développera ainsi sa notoriété et sa légitimité.
    • La vidéo sponsorisée : elle peut prendre plusieurs formes (interviews, reportage vidéo…), mais a toujours vocation à présenter et valoriser l’annonceur.
    • Le diaporama : vous connaissez sans doute ce type de contenu : « 12 bureaux magnifiques de start-up à Paris » avec une image et une courte description par page. Pour accéder à la suite du contenu, le lecteur doit cliquer sur le bouton « suivant » et accéder à une autre page. Ce format est particulièrement intéressant pour le média, car chaque fois qu’une nouvelle page se charge les bandeaux publicitaires s’affichent de nouveau et comptabilisent une nouvelle impression. En revanche, ce format est déplorable en matière d’expérience utilisateur.
    • Les tops : il s’agit de classements du type « les 100 entreprises qui affichent la plus forte croissance » et qui permettent aux médias de nouer de bonnes relations avec les annonceurs B2B.

Celle liste est non exhaustive, mais montre bien la grande diversité des formats de contenus promotionnels. Certains sont gratuits et ont pour but d’installer une relation avec le prospect, mais la plupart sont payants et se vendent jusqu’à plusieurs milliers d’euros le contenu.

Quand les médias B2B oublient leur principale mission : informer

Forcément à ce prix-là, les médias B2B s’attachent à apporter satisfaction aux annonceurs. Récolte et transmission des leads générés, valorisation du contenu promotionnel sur les réseaux sociaux, pushs dans la newsletter abonnés… et ils ont raison !

En revanche moins nombreux sont ceux qui contrôlent la qualité de leurs contenus promotionnels. Difficile de demander à un client qui veut absolument parler de son dernier produit de réécrire son contenu 2, 3 ou 4 fois jusqu’à ce que celui-ci soit réellement informatif, objectif et respecte la ligne éditoriale du média ! Il est plus simple de céder aux demandes des annonceurs pour entretenir une bonne relation et les fidéliser.

De ce fait, une partie des contenus du média deviennent entièrement publicitaires. Là où le bât blesse, c’est que le ratio contenus promotionnels / contenus informatifs penche de plus en plus du côté du Content Marketing. Il faut dire qu’il est plus intéressant d’allouer ses ressources à des contenus qui rapportent de l’argent qu’à des contenus qui rapportent simplement des visites. Et qu’il est plus facile et rapide de mettre en ligne les contenus prêt-à-publier des annonceurs plutôt que de produire des articles de fond.

Conséquence : certains médias B2B proposent plus de contenus publicitaires que d’informations. Ils oublient ainsi le sens même de leur existence : proposer des informations de qualité et objectives à leur lectorat.

Le Content Marketing est parfois à l’origine de conflits au sein même des organisations médiatiques. J’ai pu le constater par moi-même quand j’ai opté en 2015 pour un publi-rédactionnel dans un média de référence du e-commerce. Le média proposait en effet de publier sur son site l’article que j’avais rédigé au nom de ma société, de le promouvoir dans sa newsletter, et de le partager sur les réseaux sociaux à une fréquence définie. Le média a tenu ses engagements sur la publication et les pushs newsletter, mais pas sur la promotion sociale.

Pourquoi ? Parce que certains journalistes et le Community Manager étaient opposés au Content Marketing et à la promotion de contenus sponsorisés sur les réseaux sociaux au nom du média. L’article en question ne faisait pourtant l’apologie d’aucun produit et était un contenu de fond. Mais certains des salariés de ce média étaient « en résistance » contre l’omniprésence des contenus promotionnels dans leur média. C’est dire si le sujet est sensible pour les lecteurs, mais aussi pour les rédactions !

Côté blogueurs : « Mon royaume pour plus d’audience »

Le blogging B2B s’est démocratisé en France au début du 21ème siècle avec une poignée de précurseurs, à l’instar de Frédéric Cavazza par exemple. Les premiers blogs B2B étaient tenus par des professionnels, experts de leurs industries respectives. Ils questionnaient, exploraient, remettaient en cause, essayaient de faire bouger les lignes. Bref, c’est la passion qui guidait la plume de ces auteurs !

Bien entendu certains blogueurs B2B sont encore animés de cette même flamme en 2017. En revanche, une autre génération de blogueurs a vu le jour avec des objectifs bien différents :

  • Promouvoir leur activité de freelance,
  • Gagner de l’argent via leur blog,
  • Obtenir de la reconnaissance pour flatter leur égo.

Le fléau des « faux experts »

Une grande quantité de blogs B2B sont aujourd’hui administrés par des auto-entrepreneurs : webmarketeurs, community managers, créateurs de sites web, référenceurs, coachs, formateurs etc. Seule une petite partie de ces freelances a l’opportunité de travailler avec des grandes marques. Ces dernières ont déjà beaucoup de ressources en interne et ont davantage tendance à collaborer avec de grandes agences et des prestataires technologiques.

La majorité de ces freelances cible une clientèle de TPE et de PME. Face à la concurrence de leurs confrères, un bon moyen de se légitimer et de se démarquer consiste à tenir un blog pour partager son expertise. D’ailleurs, avez-vous remarqué comme tout le monde est devenu « Expert [insérez n’importe quel sujet B2B de votre choix ici] » au cours des trois dernières années ?

Certains de ces blogs sont véritablement administrés par des professionnels dont l’expertise n’est plus à prouver. Ces blogs-là sont d’ailleurs souvent plus pertinents que les médias trop promotionnels évoqués ci-dessus. D’autres sont en revanche tenus par des experts autoproclamés qui partagent au mieux des informations banales, au pire de très mauvais conseils ou du contenu dupliqué.

Pourquoi râler me direz-vous ? Il suffirait de ne pas les lire ! Tout simplement parce que les réseaux sociaux sont inondés par ce genre de contenus, et qu’il devient vraiment difficile de les éviter. Mais aussi parce qu’il en va de l’image de nos industries B2B. Je ne compte plus le nombre de fois où j’ai entendu dire que les référenceurs ou développeurs freelances étaient des charlatans. Bien sûr il y en a toujours quelques-uns, mais il s’agit d’une infime minorité de personnes. Sauf que leurs contenus attractifs séduisent des annonceurs qui tombent ensuite de haut !

Comment les reconnaître ? Rien de plus facile : si un blogueur vous donne des conseils concrets et applicables, c’est qu’il maîtrise son sujet. Si un autre blogueur reste vague et vous dit « il faut bâtir une stratégie social media et améliorer votre référencement pour attirer plus de visiteurs… » et d’autres banalités du genre sans expliquer comment faire concrètement (pour mieux vous vendre une formation derrière), passez votre chemin. Autre technique : si l’auteur du contenu vous parle davantage de résultats plutôt que de la manière dont les atteindre, c’est qu’il essaie de vous vendre du rêve.

Exemple : « Voici le secret caché des blogs qui ont des milliers de lecteurs fidèles ».

Avec ce titre putaclic, l’auteur nous promet de nous dévoiler un secret bien gardé qui nous aiderait à avoir plus de visiteurs sur notre blog. Sauf qu’en lisant l’article, on se rend compte que ce secret tient en trois mots : connaître son lecteur. Inutile de préciser que ce « conseil » est vraiment la base, un fondamental de la communication que chaque blogueur connaît et applique déjà. Nous sommes bien loin de la solution miracle promise dans le titre. Merci Captain Obvious !

Les dérives de la course à l’audience

Tout blogueur souhaite que ses articles soient lus par la plus forte audience possible. Les motivations des blogueurs B2B sont diverses : la passion et le plaisir du partage de connaissances, le désir de trouver de nouveaux clients, de se faire connaître dans l’industrie, d’accroître son employabilité, de flatter son égo, ou encore de gagner de l’argent en vendant des espaces publicitaires.

Certains blogueurs B2B se sont donc lancés dans une véritable course à l’audience. Les titres putaclic qui étaient autrefois l’apanage de Buzzfeed et des Youtubeurs sont ainsi devenus légion dans le B2B. Mais qu’est-ce qu’un titre putaclic au juste ? Il s’agit d’un contenu dont le titre, volontairement racoleur, vise à inciter les internautes à cliquer sur le lien en jouant avec leurs émotions, quitte à en faire des tonnes ou à ne pas respecter sa promesse éditoriale.

Voici trois exemples de clickbait sur le sujet du Content Marketing :

  • « Les 5 étapes pour générer des MILLIONS de vues sur YouTube pour votre activité sur le web… même si vous êtes un total débutant »
  • « 7 règles confidentielles (et tirées du film Fight Club) pour un blog légendaire »
  • « 20 choses à arrêter aujourd’hui si vous ne voulez pas que votre blog détruise votre vie »

Si ces blogueurs s’en tenaient au clickbait pour séduire les internautes, cela ne serait pas si grave. Mais pas question de laisser partir ces nouveaux visiteurs : il faut capter leur attention pour les inciter à rester le plus longtemps possible sur le site.

Étude de cas :

Je suis récemment tombé sur cet article qui concentre à lui seul une grande partie des dérives du Content Marketing. Il s’agit de l’article « Comment stopper d’être invisible » publié en décembre 2016 par le blogueur Théo Rossi sur Trucs de Blogueuse.

En soi, le but de cet article est noble : aider les blogueurs à accroître leur visibilité en ligne en leur donnant des techniques pour mieux rédiger leurs articles. Alors, si le sujet est intéressant et que l’intention de l’auteur est louable, qu’est-ce que je reproche à cet article ?

1/ L’infantilisation du lecteur :

L’objectif de l’auteur est simple : il veut d’entrée de jeu que son lectorat s’identifie à ses propos pour l’encourager à lire la suite de l’article.

Ainsi, dès le début, il écrit : « Ce n’est plus possible. Ce qui vient de se passer, c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase. Ce nouvel article que vous venez de publier et que personne ne remarque une fois de plus, vous n’en pouvez plus. Aucun commentaire, aucun partage… Rien. C’est déprimant. ».

Puis : « Je sais ce que c’est : je suis passé par là moi aussi.  Lorsque j’ai lancé mon tout premier blog, personne ne me lisait et je n’attirais l’attention de personne. »

L’auteur impose la situation décrite ci-dessus comme étant celle de son lecteur. Il exclut d’office la possibilité que l’internaute puisse être un minimum initié et soit venu sur l’article pour se perfectionner. Il s’impose en une figure rassurante, prête à gracieusement partager son savoir et son expérience. Ce processus infantilise le lecteur. L’auteur est meilleur que le lecteur et le lui fait savoir, avec une condescendance déguisée en bienveillance.

2/ Le manque de respect envers le lecteur :

Pour être sûr que de bien capter l’attention de l’internaute, Théo Rossi n’y va main de main morte : « Comprenez-moi : si j’endosse la peau du méchant aujourd’hui, c’est pour vous faire prendre conscience d’une vérité tragique, mais bel et bien réelle. Vous êtes prêt ? La voici : vos lecteurs n’en ont rien à battre de vos articles. »

Je ne suis pas contre une pointe de provocation ou d’ironie dans un article. Mais ce genre d’assénassions sont un vrai manque de respect envers le lecteur. Après tout, l’auteur a-t-il lu les articles de tous ses lecteurs ? Non. Alors comment peut-il flinguer leur travail de la sorte sans avoir individuellement analysé les articles produits par chacun d’entre eux ?

Il n’existe pas de meilleure manière de décourager des blogueurs débutants ou des entreprises souhaitant se lancer dans le blogging.

3/ De donner de mauvais conseils :

Voici quelques exemples de conseils distillés par Théo Rossi dans son article :

  • « Agissez comme un perroquet qui répète tout ce qu’il entend, et vous vous en sortirez comme un chef.»
  • « Vos lecteurs ne veulent pas être informés : ils veulent être séduits. Et le meilleur moyen de faire ça, c’est de raconter une histoire. D’enrober vos conseils d’un récit.»
  • « Publier sur votre blog alors que vous n’avez pas une audience importante ne sert à rien»

L’auteur présente ces trois conseils comme des vérités absolues. Sauf que dans le Content Marketing, comme pour n’importe quelle autre industrie du B2B, il n’existe pas de recette miracle. Chaque projet est unique, se place dans un contexte spécifique, et s’adresse à une cible différente.

Par ailleurs, je ne suis pas sûr que se comporter comme un perroquet soit la meilleure manière de réussir. Je ne suis pas sûr non plus que pour les internautes, la séduction prime sur l’information. Et si les professionnels du B2B ne souhaitaient pas être informés, Siècle Digital n’aurait aucun visiteur, ce qui n’est manifestement pas le cas puisque vous êtes en train de lire cet article.

4/ Le narcissisme :

Parler à la première personne et donner un point de vue ne pose aucun problème dans un article B2B. En revanche, nul ne devrait se lancer des lauriers en permanence et chercher la reconnaissance de son lectorat pour flatter son égo :

Exemple : « Sur mon blog actuel, j’ai réussi à attirer des lecteurs, des inscrits, et je commence petit à petit à créer une communauté sympa. Eh bien, tout cela est dû à une méthode que j’ai appliquée.  Cette méthode, c’est celle que je vais vous dévoiler dans cet article. »

Mais pire encore. Dans cet article sur le sujet du blogging, Théo Rossi consacre 1 200 mots pour raconter… son hospitalisation suite à un décollement du poumon. Tout y passe : le foudroiement du poumon lorsque l’auteur déballe son cadeau d’anniversaire, la description de la souffrance, la gravité de la situation « Votre fils va mourir si on ne l’opère pas maintenant madame, signez tout de suite ! », la rencontre avec l’enfant orphelin avec qui il a partagé sa chambre d’hôpital… et même une image de la radio de ses poumons pour illustrer son histoire.

Étrange cependant : ladite photo de la radio des poumons est datée de juillet 1997 alors que l’auteur affirme que cette histoire s’est déroulée en juillet 2016. Je ne connais pas l’auteur personnellement et je ne me permettrais pas de mettre en cause la véracité de cette histoire.

Mais la vraie question qui se pose, c’est bien celle du narcissisme : pourquoi raconter tout cela dans un article dédié au blogging ? Pourquoi mettre en scène une histoire aussi intime ? Pour séduire les lecteurs anonymes d’un blog qui n’est même pas le sien ? Pour récolter des commentaires compatissants et générer des téléchargements d’ebook ? Le Content Marketing est-il tombé si bas ?

Cet exemple est bien entendu assez extrême, mais illustre bien les maux du blogging B2B en 2017 : clickbait, infantilisation de l’audience, fausse expertise / partage de mauvais conseils et narcissisme.

Côté entreprises : Business First

Toute entreprise qui se lance dans le Content Marketing espère obtenir un retour sur investissement. Chacune a des objectifs qui lui sont propres : développer sa notoriété, valoriser son expertise, générer des leads, accroître les ventes, augmenter le SEO de son site…

À l’instar des médias B2B et des blogs B2B de grande qualité, certaines entreprises sont reconnues pour la pertinence de leurs contenus. Dans certains cas, ces entreprises empiètent même sur les plates-bandes des médias. Je pense par exemple à Hubspot, Wizishop ou encore à l’Atelier de BNP Paribas.

Conscientes des opportunités liées au Content Marketing, beaucoup de sociétés B2B se sont lancées sur les traces de ces modèles. Aujourd’hui, les réseaux sociaux professionnels sont envahis de contenus produits par ces entreprises.

À l’inverse d’un média ou d’un blog B2B, lorsque l’on arrive sur le site d’une entreprise, on peut s’attendre à tomber sur du contenu promotionnel. Ne pas en avoir serait même surprenant. Je ne rentrerai pas dans les détails des rouages du Content Marketing pour les entreprises B2B car il existe déjà de nombreux articles sur le sujet.

Peut-être faudrait-il simplement rappeler que si certains formats (études de cas, webinars, livres blancs…) se prêtent bien à la promotion de produits ou de services, ce n’est pas le cas des articles de blog. Un article qui adopte une posture commerciale n’intéresse personne. Privilégiez plutôt une démarche bienveillante et désintéressée pour sensibiliser votre lectorat aux enjeux de votre business, sans directement parler de ce dernier. Écrivez pour les internautes et non pour Google, et évitez de rabâcher les mêmes sujets lus et relus en adoptant des angles originaux.

Alors pour répondre à la question posée par cet article, le Content Marketing est-il en train de tuer l’information B2B ?

De mon point de vue, la réponse est non. J’ai une pensée pour tous le médias, blogueurs, et entreprises qui publient au quotidien du contenu de grande qualité, et je les en remercie sincèrement. En revanche, il est vrai que la quantité de contenus B2B a explosé ces dernières années, et que malheureusement les contenus qui proposent une réelle valeur ajoutée ont tendance à se noyer dans la masse, au milieu d’autres contenus promotionnels, narcissiques, et dénués d’intérêt.

Alors que faire ? À nous d’être vigilants à la pertinence des contenus que nous partageons et que nous recommandons, afin de mettre en lumière les acteurs qui s’attachent à la qualité de l’information, au débat, à la remise en cause et à la prospective.

Et pour vous, le Content Marketing est-il en train de tuer l’information B2B ? N’hésitez pas à donner votre avis dans la section « commentaires » de cet article !