Nous connaissons tous le choix récent de MinuteBuzz sur ce point, mais le groupe CNN a lui aussi son poulain : Great Big Story. Fondé il y a tout juste un an, GBS élabore du contenu allant de 2 à 20 minutes. Les vidéos sont de courts reportages, très informatifs et dynamiques. Les sujets sont néanmoins très variés. Très loin des vidéos de chatons ou de buzz, on retrouve des sujets comme « qu’est-ce que ça fait d’être dans la peau d’un stormtrooper » ou bien « le combat pour sauver les tortues de mer de Zanzibar » ou encore « the Spinach King of South Africa. »

Depuis ses bureaux de New York, Chris Berend, co-fondateur de Great Big Story revient avec nous sur cette première année très riche pour son média, mais nous parle aussi de son futur.

Siècle Digital : Great Big Story a soufflé sa première bougie, félicitations ! Comment l’idée de créer une plateforme vidéo comme média est-elle venue ? Quelle histoire derrière la création de Great Big Story ?

Chris Berend : Nous avons lancé Great Big Story en automne dernier, mais l’idée avait germé six mois plus tôt. Un collègue et moi-même regardions le paysage de ce qui était proposé par l’ensemble des médias et notre groupe. CNN est leader de l’information internationale. Nos efforts et nos investissements apportent une belle croissance sur un marché que nous maîtrisons parfaitement. Nous sommes aussi performants pour servir de l’information traditionnelle et non-traditionnelle aux consommateurs. Pourtant, nous avons identifié un fossé en termes de contenu dans ce qui n’est pas nécessairement des ‘news’, mais plutôt du storytelling. Nous avons observé ce que faisait Vice, mais un certain nombre de personnes ne s’identifient pas à ce qu’ils font. De la même manière, tout le monde aime ce que fait Buzzfeed, mais tout le monde veut plus que ce que fait BuzzFeed. Nous avons senti qu’il y avait quelque chose à faire pour notre audience.

D’un point de vue créatif, nous avons vu l’impact de quelqu’un appelé Anthony Bourdain à la télévision [sur CNN ndlr] qui présentait sur le terrain de vraies histoires avec de vraies personnes. Nous avons senti qu’il y avait là une idée pour créer des vidéos entièrement dédiées au numérique et facilement distribuables sur différentes plateformes : Apple TV, Facebook, Twitter, YouTube, application mobile.

Pour ce qui est des plateformes, nous ne voulons pas avoir pour soucis que les gens aillent sur notre site ou ailleurs, mais plutôt nous concentrer sur la manière dont on va jusqu’à eux. Nous avons un beau site et une superbe application, mais nous savons que nous devons être partout.

SD : Après un an, l’heure est au bilan. Qui se cache derrière l’audience de Great Big Story ? Combien de personnes regardent vos contenus ?

C.B. : Il s’est passé un peu plus d’un an maintenant et le succès a été au rendez-vous. À quoi l’audience ressemble maintenant ? Sur l’ensemble de nos plateformes, nous avons plus de 10 millions d’abonnés et notre portée est bien plus importante puisqu’en fonction des semaines, nous touchons entre 13 millions et 40 millions de personnes toutes plateformes confondues. Naturellement, les plateformes sociales sont celles sur lesquelles nous sommes allés dès le départ et ont été celles qui ont le plus vite augmenté. Indépendamment, elles sont très différentes et les abonnés interagissent différemment aussi.
Le type d’engagement est très différent entre Facebook et YouTube par exemple, ou aussi avec l’Apple TV. Sur cette dernière, la durée moyenne d’une session est de 20 minutes. Nous avons plus d’engagement sur Facebook et le temps passé sur nos vidéos sur le réseau social est bien au-dessus de la moyenne. Sur YouTube le temps de vue est beaucoup plus important que pour Facebook ou Twitter. C’est toujours intéressant de comparer les engagements.

Nos abonnés ont en moyenne 26 ans, sans réel fossé entre les hommes et les femmes. Les États-Unis restent notre principal pays, mais nous identifions actuellement une grosse croissance sur l’international avec de nouveaux abonnés qui viennent principalement d’Europe de l’Ouest et d’Asie.

SD : Le modèle de monétisation pour un média vidéo doit être différent de celui d’un au tre publisher … comment Great Big Story monétise sa plateforme ?

C.B. : Notre modèle de monétisation est basé sur le branded content. Nous n’avons ni display sur notre site, ni pré-roll sur nos vidéos. Nous travaillons de deux manières avec les annonceurs, même si nous les voyons vraiment comme des partenaires.
La première consiste en une série éditoriale, c’est pour nous un sponsoring traditionnel. Nous identifions des séries ou des concepts qui nous intriguent, qui intéresseront par conséquent notre audience, et qui collent avec les valeurs et la stratégie de communication de la marque. Si vous regardez bien sur notre site, actuellement nous avons réalisé des vidéos pour le constructeur de voiture Genesis, Hewlett Packard Entreprise, ou Audi. Chacun possède une chaine qui lui est dédiée où l’éditorial sponsorisé y est prédominant et intégré avec les mentions « inspired by » ou « presented by. »
La seconde option est le branded content dans laquelle nous appliquons nos capacités pour créer quelque chose où le produit ou la marque de l’annonceur est au-devant de la scène. Le contenu est principalement guidé par le storytelling, technique que nous maîtrisons très bien.

L’absence de display ou de pré-roll est vraiment très importante pour nous. Nous montrons à nos annonceurs l’impact de ce type de partenariat opposé à une simple publicité de 30 secondes. Nous créons de la valeur pour la marque, une plus grande mémorisation, mais aussi plus d’engagement.

SD : Quels sont vos projets pour l’année prochaine ?

C.B. : Je pense qu’il y a de belles choses à faire avec la VR pour le storytelling, donc nous allons un peu nous amuser avec cette technologie. Dans les 12 prochains mois vous devriez pouvoir découvrir un grand nombre de contenus accessible en réalité virtuelle.
Nous prévoyons aussi une expansion internationale pour 2017. Notre siège reste à New York, mais nous allons ouvrir de nouveaux bureaux dans d’autres villes du monde. Grâce à ces nouveaux bureaux nous comptons augmenter notre capacité de production pour produire plus de vidéos pour Great Big Story, mais aussi pour des tiers.

SD : En France, un publisher a décidé de créer un média 100% vidéo, mais seulement sur les réseaux sociaux. Ils ont décidé de fermer leur site. Que pensez-vous de cette approche ?

C.B. : Les plateformes où vous devez être ou ne pas être, ce n’est pas un débat et ça ne devrait pas être un débat. Peu importe l’endroit où votre audience se trouve, vous devez y être. Un média aux États-Unis a fait sensiblement la même chose il y a peu de temps. Pour le média que vous citez, je peux difficilement me mettre à leur place, mais je peux vous dire la manière dont je vois cela. Pour Great Big Story, nous ne nous reposons pas sur un seul canal pour distribuer notre contenu.

Il peut être difficile et parfois très cher de créer de l’audience. Nous sommes conscients du challenge que représente le fait d’être distribué sur un maximum de plateformes. Si nous avons toujours une application mobile et un site web, c’est pour de nombreuses raisons. La première c’est la notoriété de notre marque. La seconde c’est la création d’une relation avec l’audience et être en mesure de lui donner des endroits où se rendre pour accéder au contenu. Et la dernière c’est créer de la valeur pour nos partenaires et nos sponsors.