À la fin du mois de septembre, CNBC annonçait que Twitter s’était rapproché de Goldman Sachs et Allen & Co pour trouver de potentiels acquéreurs et évaluer leurs propositions. Rapidement, les premiers noms sont tombés : Disney, Google, Salesforce, Microsoft, Apple, et même Verizon. De grands et beaux noms qui ont tous vu de nombreux intérêts à ajouter Twitter à leur portefeuille. Ces sociétés annoncées, le cours de l’action de Twitter Inc (TWTR) a grimpé pour redescendre encore plus bas quelques jours plus tard après les premiers désistements.

Petit à petit, les intéressés se retirent. Dès le départ, Verizon avait infirmé les spéculations sur sa volonté d’acquérir le réseau social. Au début du mois d’octobre, Google s’est aussi retiré. Pourtant, la firme de Mountain View était la société la plus encline à faire main basse sur Twitter du fait de son statut de partenaire. Dans le même temps, nous avons aussi appris que Disney n’était aussi plus dans la liste.

Du côté de Microsoft, aucune information n’a été communiquée, mais (presque) tout le monde s’accorde à dire que l’acquisition de Twitter pourrait faire tâche. En effet, la société fondée par Bill Gates et Paul Allen a mis l’accent sur la cible professionnelle depuis quelques mois. En plus d’avoir racheté LinkedIn, le géant fait main basse sur différents services pour les entreprises comme Sunrise, Yammer, Genee. Dans le même temps, il lance des applications et complète sa suite de logiciels avec Planner ou Microsoft Flow.

Il reste Salesforce et Apple me direz-vous. Et bien du côté de la pomme pas de sources officielles, mais il y aurait un certain désintérêt. Pour le géant du CRM, son CEO Marc Benioff a annoncé récemment au Financial Times que son entreprise n’était plus intéressée et s’était par conséquent retirée du projet.

Enfin, Chris Sacca, actionnaire historique du réseau social a vendu une grande partie de ses parts récemment. Sentant le vent tourner, il a aussi déclaré qu’il trouvait que Jack Dorsey n’en avait pas assez fait pour le réseau social.

Pour résumer cette épopée … ça ne sent pas bon pour Twitter. Mais est-ce ça ne sentait pas mauvais dès le départ ?

Pourquoi ne pas racheter Twitter ?

Le réseau social a connu depuis toujours des hauts et des bas. Pourtant, du haut de ses 10 ans Twitter est toujours là et ses revenus croissent, bien que de façon assez lente. Mais qu’ont donc bien pu découvrir les sociétés intéressées par l’acquisition de Twitter ? Si nous n’avons pas sous les yeux l’état des comptes du réseau social, il faut aussi prendre en compte son potentiel de rentabilité et donc de monétisation.

Si Chris Sacca a jugé les initiatives de Jack Dorsey insuffisantes ces dernières années, c’est certainement sur la profondeur d’utilisation de Twitter. Il est indéniable que l’on peut faire énormément de choses sur le réseau social, mais s’y balader ne prend que quelques minutes à chaque fois. Comparé à son grand rival, Facebook, il est difficile de passer des heures sur Twitter à regarder des photos, des vidéos, jouer à des jeux, discuter, etc. L’expérience sur le réseau social dirigé par Jack Dorsey est en silo. D’un côté la messagerie, d’un autre on ne regarde qu’une vidéo (absence de suggestions), et enfin tout le monde se ressemble. Dans la profondeur d’expérience, il faut aussi prendre en compte la différence de profil d’utilisateur.

Très rapidement, Facebook a mis en place un gabarit spécial pour les entreprises : les fameuses Pages Facebook. Sur Twitter, très vite des marques ont commencé à venir sur le réseau social pour son aspect conversationnel. Il ne fait aucun doute que Twitter offre une proximité qu’il est difficile de retrouver sur le réseau social de Mark Zuckerberg, mais une distinction avec un affichage différent pour un profil de marque aurait été la bienvenue. En 10 ans, la question ne s’est-elle jamais posée ? Un affichage comme cela aurait permis à des utilisateurs de retrouver facilement les marques qu’ils aiment avec une expérience et une interface différente de s’ils allaient voir le profil d’un de leurs amis. Côté marque, ce type de profil aurait pu permettre d’accéder à de nombreuses données et paramètres. De plus, avec un Twitter qui est maintenant sous algorithme un travail sur le reach des publications de marques Vs grand public aurait été bien accueilli.

Revenons maintenant sur l’aspect monétisation. Avec Amplify et les nombreux autres formats qui sont sortis sur Twitter, le réseau social offre une place plus importante aux marques pour qu’elles puissent communiquer. Malheureusement de nombreux autres points de contact ne sont pas exploités. Tout d’abord les lives sur Periscope – qui sont à présent sauvegardés – ne sont pas liés à de la publicité. Avec un pourcentage destiné au créateur, on pourrait très bien imaginer voir arriver une publicité au début d’un live qui va durer plus de x minutes. Et même intégrer une publicité au bout d’un certain temps de vidéo…

Sur la même volonté d’insérer des publicités sur d’autres points de contact, il y en a un qui serait beaucoup plus évident pour encore une fois inexploité : les articles. Très tôt, Twitter a innové en lançant les Twitter Cards qui permettent d’afficher un bloc lorsque l’on partage un lien. Le produit est laissé à l’abandon, bien que fonctionnel. Dans un second temps, Google annonce AMP, Facebook les Instant Articles et Apple le format Apple News. Chacune de ces sociétés intègre sa propre régie : Google c’est Adsense, Instant Articles c’est Audience Network, et Apple c’est iAds. Alors pourquoi Twitter n’a pas surfé sur cette tendance ? Le réseau social accueille pourtant des milliers de médias pour qui il représente au minimum 10% de leur trafic (nous, c’est 30%). Cela en fait des visiteurs qui pourraient voir les publicités des annonceurs. Mais non, rien à signaler de ce côté. Néanmoins, une annonce a été faite en octobre 2015 sur une association Twitter-Google, mais rien ne semble avoir été mis en place.

En complément de la sortie de nouveaux formats publicitaire, l’expérience sur le réseau social s’est assez peu développée. Certes, il y a les Moments ouverts à tous, l’intégration de Periscope, l’ajout de Stickers, la fin des 140 caractères, le mode nuit, … Mais cela ne casse pas trois pattes à un canard. La sortie de nouveaux formats semble démontrer une volonté de vendre plus, mais pas de vendre mieux. La sortie de petites fonctionnalités semble démontrer que le réseau social a besoin de montrer qu’il est actif, sans pour autant savoir où il va.

Pour résumer, les choses ont bougé chez Twitter, mais pas suffisamment vite et dans le bon sens. Afficher des articles AMP dans Twitter ne signifie pas plus de publicités à servir aux utilisateurs. La profondeur d’expérience ne permet pas non plus de montrer plus de publicités ou d’offrir une utilisation plus aboutie. Dans l’état actuel du réseau social, cela ne se présente pas très bien pour un acquéreur éventuel, mais il y a une belle marge de progression dans le développement de sources de revenus. Pour l’instant le réseau social n’est pas encore fixé, les rumeurs et les déclarations continuent d’aller bon train, de quoi nous tenir en haleine pendant encore quelques semaines.