Commençons par distinguer fidélisation et fidélité, l’un est une démarche volontaire de l’entreprise, tandis que l’autre est une attitude “naturelle” des clients envers une marque.
Cette différence sémantique peut sembler subtile, mais c’est tout ce qui fait la différence entre les clients d’Air France qui sont séduits par le programme de fidélisation avec des Miles, et d’autre part Apple qui a une communauté de Fans sans pour autant mettre en place un véritable programme de rétention clients.

Pourtant la plupart des enseignes s’échinent toujours à privilégier le recrutement de nouveaux clients – bien plus couteux – que de chercher à développer des programmes de fidélisation adaptés.

Pourquoi est-ce important de fidéliser ?

Tout simplement car la fidélisation demeure l’un des plus puissants leviers pour développer son enseigne sur le moyen et long terme…
Voici quelques chiffres pour vous en convaincre :
– 5% d’augmentation du taux de rétention sur les meilleurs clients peut générer entre 25 et 55% d’augmentation des bénéfices d’une entreprise (ventes croisées, montée en gamme, accessoires, montée en gamme…) selon Bain & Cie.
– Il est généralement 7 fois plus coûteux de recruter un nouveau client que de vendre à un client existant qui est déjà convaincu de la qualité de vos produits.
– 68% des clients quittent une entreprise non pas en raison de problèmes, mais tout simplement par manque de communication selon une étude de Sage France (livre blanc à télécharger sur SageCRMSolutions.fr).
– 98% des clients mécontents ne le font jamais savoir, ils se contentent de vous quitter selon P. Fisk de Customer Genius… Et encore plus frappant dans cette étude, c’est que 75% des expériences négatives sur un produit ou un service n’ont aucun rapport avec le produit en lui-même mais avec tout ce qui l’entoure (services…).
Ces chiffres ont pour objectif de montrer qu’avant de vouloir partir à la chasse aux prospects et mener un long travail de séduction, il est essentiel de valoriser le mieux son patrimoine clients si chèrement acquis…
Cette attitude devrait être sans surprise, car les hommes préhistoriques l’ont compris bien avant nous: il est plus rentable d’élever un cheptel que de partir tous les matins à la chasse avec tous les aléas et les incertitudes que cela comprend…

Fidéliser est-ce retenir tous ses clients ?

Si fidéliser c’est construire une relation durable (chaines et programme de fidélisation) et personnalisée (anniversaire, promos exclusives…) avec ses clients, cela ne veut pas dire que tous les clients doivent être égaux…
En effet, comme disait Coluche, certains clients sont plus égaux que d’autres car ils génèrent plus de chiffre d’affaires ou de marge, alors que d’autres sont peu ou rentables (petites commandes…).
Un programme de fidélisation pourra donc avoir plusieurs buts:
– Retenir les meilleurs clients via des promos, du conseil, de la valorisation personnelle…
– Faire consommer plus les clients (upsell, crossell).
– Détecter et réactiver les clients inactifs ou en baisse de commande.
– …
Si nécessaire il faudra créer plusieurs programmes avec des objectifs différents : soit de retenir les bons clients, soit développer les ventes des petits clients…
Un programme de fidélisation peut également être communs à tous les clients, mais personnalisée selon chaque client : envoi de messages pour les anniversaires, pour les soldes…
Le programme de fidélisation n’est pas forcément lié au produit ou à des avantages financiers.

C’est aussi reconnaître et récompenser ses clients, en leur donnant l’impression qu’ils sont privilégiés : Interlocuteur dédié, Club VIP, Ventes Privées, des appels téléphoniques non commerciaux, de trucs et astuces, trophées & récompenses, interviews & témoignages…
Ainsi un programme de fidélisation avec juste une carte de fidélité ou un cumul de points sans stratégie pour développer l’usage, les ventes… est inutile s’il ne sert pas un objectif de vente ou de rétention.

De plus un programme de fidélisation doit avoir un objectif moyen et long terme (les programmes de fidélisation à 6 mois ne sont que des Promotions).
Le second stade est de miser sur le relationnel et la viralité.
En effet au-delà du simple programme de fidélisation, pour acquérir la fidélité de ses clients il est nécessaire de créer un vrai relationnel entre la marque et le client.
Pour cela il faut placer plus d’humain dans des relations qui deviennent de plus en plus numériques (Chat, emails…), avec une intervention humaine ou au moins de l’intelligence dans les interventions (agents conversationnels, trigger marketing…).
L’intérêt étant d’aller au-delà de la communication unidirectionnelle, et de mettre en place une véritable conversation entre la marque et ses clients.
Cette communication peut aussi être simplifiée par la mise en place d’un CTI avec l’affichage automatique des fiches clients sur l’écran des opérateurs, la gestion de boucles d’attentes (en laissant toujours le choix d’obtenir un opérateur pour ne pas frustrer les personnes avec des cas spécifiques…)…
A noter que ces nouveaux canaux de communication peuvent permettre de proposer de nouveaux produits ou services, par exemple un Self Service permettant de proposer un service d’assistance autonome disponible 24h/24, un support technique peut se faire en Chat, la mise en place de procédures d’escalade avec des délais de réponse garantis…
Au niveau des relations personnelles, il faut également exploiter les communications transversales (en plus des communications verticales entre l’entreprise et le client), en faisant agir et communiquer les clients et prospects entre eux.
Par exemple via un programme de parrainage qui met en valeur tout l’écosystème de l’entreprise, des salariés aux clients “Ambassadeurs” (ces fameux clients qui font la promotion et qui défendent votre marque), en passant par les prescripteurs, afin d’influencer les clients passifs et les prospects :

fidélisation commerce

Pour que l’offre de parrainage fonctionne il est important de mettre en place une offre gagnant / gagnant, pour le parrain et le filleul, mais également plus l’entreprise.

Les clients s’éloignent des programmes de fidélité.

Malgré tout ce que vous venez de lire, les études et la recherche sur ces sujets suggèrent que la réponse sur l’efficacité des différents programmes de fidélisation client est  : «impact probablement négatif».
– Un ménage moyen aux États-Unis adhère à plus 21 programmes de fidélisation.
– Seuls 44 % d’entre eux l’utilise.
– Plus de la moitié des consommateurs ont admis qu’ils avaient abandonné un programme de fidélisation de la dernière année.

L’analyse des opinions et des sentiments des clients sur les médias sociaux révèle une insatisfaction prononcée.
– Près de 90% des opinions et des sentiments sur les des médias sociaux sur les programmes de fidélité est négative.

Un étude a évalué les programmes de fidélisation sur un certain nombre de paramètres, leur objectif central, leur utilisation des données, leur capacité à offrir une expérience homogène en multi-canal.

Elle constate que les entreprises ont un gros travail de rattrapage à faire.
– 97% des programmes de fidélisation reposent sur les récompenses transactionnelles : des points après achat, en cadeaux, marchandises ou de remise.
– 77% de ces programmes basés sur les transactions échouent dans les deux premières années.
– Seul 25% des programmes de fidélité clients intègrent une forme d’engagement.
– Faible personnalisation : 11% seulement des programmes offrent des « récompenses personnalisées » basées sur l’historique d’achat ou de localisation des données d’un client.

Les études confirment que les entreprises doivent penser au-delà de la carte plastique, d’un simple programme ou de ses points et mettre en œuvre des nouveaux programmes digitaux bien conçus, reposant sur une vraie promesse basée sur un engagement relationnel mutuel.

Comment réintroduire la notion de fidélité ?

L’acte d’achat est dorénavant associé à la notion d’instantanéité. Il s’agit d’obtenir le produit/service attendu le plus rapidement possible. Cette dimension est absente des programmes de fidélité actuels. Les enseignes doivent donc fournir des outils de fidélisation où l’instantanéité, la sécurité et la personnalisation sont au cœur du dispositif. La technologie blockchain pourrait-elle être ce maillon manquant ? Mais de quoi s’agit-il exactement ? Effet de mode ou révolution annoncée ? Un décryptage s’impose !

En substance, cette technologie de stockage en peer-to-peer, totalement sécurisée, consiste en un système d’échanges affranchi de toute autorité centrale. Des groupes de transactions validés sont inscrits dans ce registre informatique sous forme d’une chaîne de blocs inaltérables, la fameuse blockchain. Les données stockées sont découpées et encryptées, et seul leur émetteur possède la clé pour les déchiffrer. Les utilisateurs forment ainsi un cloud virtuel, à la capacité de stockage quasi-illimitée.

Cette technologie pourrait bien aussi être salutaire pour les programmes de fidélisation, en perte de vitesse aux yeux des consommateurs. Capgemini travaille ainsi avec une fintech allemande sur une blockchain permettant aux clients des banques d’utiliser plus facilement leurs points de fidélité.

Pour la marque, gérer les points de fidélité via une blockchain permettrait à tout moment de connaître la valeur totale des points en circulation et de calculer au plus juste les provisions correspondantes. Pour le consommateur, la formule faciliterait l’usage et la gestion de ses points. Finalement, avec une blockchain spécifique, les points de fidélité deviennent purement et simplement un moyen de paiement alternatif, accepté par les membres de ce réseau. Ne resterait plus pour les marques qu’à fixer la valeur d’échange de cette monnaie virtuelle.

Le consommateur est dorénavant volatil par essence. La multiplicité des offres, des plateformes l’amène à « surfer » pour profiter de la meilleure offre au moment où il le souhaite. De ce fait, les programmes de fidélité sont souvent inopérants pour retenir les clients que l’enseigne souhaiterait conserver. La réponse technologique proposée par la blockchain est de nature à répondre à l’une des principales exigences du client moderne, l’instantanéité. Ainsi, il est en mesure d’utiliser immédiatement le fruit de sa fidélité dans une relation avec l’enseigne sécurisée et personnalisée.

Cette tribune vous est proposée par :
Philippe Sence – @SencePhilippeLinkedIn
Philippe Lehartel – LinkedIn