Gérer la créativité suppose de savoir avant tout quand tirer profit du caractère non compétitif des idées puis quand faire valoir des droits de propriété intellectuelle et faire de ses idées des produits compétitifs. Ces deux décisions sont au coeur même du processus de gestion.

La “créativité” imprègne notre vie quotidienne depuis le moment où nous nous réveillons le matin jusqu’au moment où nous nous retirons le soir. Dans la société “moderne” du XXe siècle, cette créativité et cette invention nous suivent tout au long de la journée lorsque nous allons au travail, dans les magasins, chez l’épicier et le soir lorsque nous regardons le dernier film à succès dans notre cinéma favori.

Pour comprendre la créativité et l’importance de la propriété intellectuelle dans nos efforts pour tirer bénéfice de la “propriété privée”, plongeons-nous dans l’ouvrage sur “The Creative Economy: How People Make Money From Ideas” de l’auteur John Howkins. Publié en 2001, ce livre est devenu un ouvrage de référence pour ceux qui cherchent à fusionner créativité et sens des affaires.

Depuis la fin des années 90, on s’occupe beaucoup de technologie, d’informatique et de technologie de l’information : le boum dot.com, le Web, l’Internet, et cela donne l’impression qu’on passe en grande partie à côté d’un truc qui fait tout marcher, à savoir le fait que les personnes ont des idées. Cela donne le sentiment que d’une certaine manière ces personnes sont ignorées au profit de la technologie. Il faut dorénavant s’interroger : comment les encourager à avoir des idées? Comment les faire collaborer pour avoir des idées? Comment protéger leurs idées et les développer en en faisant une activité professionnelle?

De la même manière que des générations successives de gestionnaires ont dû apprendre l’informatique et l’Internet, de même maintenant doit-on apprendre la propriété intellectuelle ?

La propriété intellectuelle était naguère un sujet abscons et embêtant, quelque chose qui était réservée aux seuls spécialistes, mais depuis quelques années, elle a commencé à exercer une grande influence sur la manière dont chacun a des idées et s’assure leur propriété et également sur la production économique mondiale.

Tout le monde doit connaître la propriété intellectuelle. La question n’est pas que l’un en sache plus que l’autre. La propriété intellectuelle est la monnaie d’échange, elle est vitale. C’est elle qui fait que, en définitive, chacun prospère et en tire une fierté personnelle. Toute personne qui conclut une transaction avec un tiers doit donc avoir des connaissances en propriété intellectuelle. Autrefois, dans la case “production”, il fallait s’y connaître en matières premières et en droit des obligations; aujourd’hui, il faut s’y connaître en propriété intellectuelle et en droit des obligations. Et tout se rapporte à la question fondamentale : “qu’est-ce que j’ai que je peux utiliser comme levier pour vendre à l’autre?”.

La propriété intellectuelle fait désormais partie intégrante de la lutte pour l’avantage concurrentiel à l’échelon mondial. On en voit l’effet dans pratiquement toutes les branches de l’industrie; non pas simplement dans les industries traditionnelles du droit d’auteur et des brevets (qui sont en expansion), mais dans toutes les industries qui dépendent de la marque, de l’image de marque et des dessins ou modèles, et cela va de l’alimentation au sport. L’entreprise veut maximiser les recettes qu’elle tire de chaque produit créatif; il lui faut donc créer le maximum possible d’éléments protégeables et de droits de propriété intellectuelle correspondants. Mais ces lois de propriété intellectuelle ont un caractère facultatif en ce sens que tout le monde peut créer et inventer en dehors du contrat de propriété.

Si l’économie capitaliste a été dominée par la conquête des territoires et des parts de marché pour s’accaparer du Bien, l’économie créative sera davantage nourrie par la conquête des cœurs et des esprits pour tisser le Lien.

Le monde va vers un nouveau  »business model » géostratégique et géo-économique où il va falloir tisser et nourrir le Lien pour accéder au Bien et conquérir le Bien pour nourrir et tisser le lien. Parce que complémentaires et inclusifs.

Alors, les enjeux et les défis de l’économie créative n’en demeurent pas moins aussi, des enjeux et défis de culture. C’est l’économie (capitalisme marchand) qui se réconcilie avec la culture qui va l’humaniser.

Article co-écrit avec Philippe Sence@SencePhilippeLinkedIn

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