Depuis la découverte des traces laissées par les premiers Hommes sur la Terre nous savons que nous sommes une espèce ritualisée. Peu importe l’ère traversée ou la société analysée, l’amour, la mort, la vie, ou d’autres moments clés sont ritualisés. Le rituel apporte un confort (sous toutes ses formes) à l’Homme et intervient dans une situation à laquelle il prête beaucoup d’importance.
Notre société a considérablement changé depuis une centaine d’années. Elle s’est transformée en séparant la religion et le gouvernement, en créant des marques, ou encore en se connectant avec le reste du monde grâce aux nouvelles technologies. Cette transformation a changé notre façon de vivre les rituels jusqu’à permettre au numérique d’en créer plus aisément pour une cible plus vaste.

Des rituels passés aux rituels contemporains.

Les rituels tels que nous aurions pu les connaitre jadis étaient d’abord poussés par des croyances. Pour les sociétés d’Histoire chrétienne, la naissance est accompagnée par le baptême, l’amour célébré à travers le mariage, la mort par les funérailles. Chacun de ces rituels doit se faire dans un contexte bien précis et en respectant un ordre bien précis. S’ils sont encore bien présents de nos jours, nous ne croyons plus de la même manière. Notre vision des pouvoirs qui nous régissent a changé, et aussi notre façon de vivre ces rituels. À présent, il existe plusieurs façons de célébrer ces évènements clés. Si ces schémas étaient si importants à cette époque, c’est que la religion faisait partie intégrante de la vie de tous les jours. Elle régissait les vies de la naissance jusqu’à la mort. À présent, ce sont les marques qui remplacent les religions dans les sociétés modernes. Du levé au couché, de la naissance jusqu’à la mort, elles nous accompagnent. La balance du pouvoir se serait-elle alors inversée en faveur du consommateur ? C’est ce que nous nous surprenons à croire. Pourtant c’est bien notre façon de consommer une marque qui crée le(s) rituel(s). Certains sont personnels, d’autres sont populaires et traversent les frontières pour créer des marques emblématiques.

La manière ritualisée de manger un Oreo est un très bon exemple. On en vient à dire que c’est la manière de manger le cookie qui importe, impliquant d’une certaine façon que c’est le cookie en lui-même qui a de l’importance. Tout ça ne fera qu’élever la valeur perçue et susciter le désir chez le consommateur. De la même manière, les « connaisseurs » de bières ajouteront une tranche de citron dans leur Corona et apprécieront déguster la mousse justement dosée de leur Guinness. Sans ces petits paramètres, on peut juger l’expérience de consommation ratée. Enfin, nous connaissons tous la technique de faire un volcan de purée et mettre du jus à l’intérieur. Ce mimétisme sera propulsé par Mousline et sa fameuse chanson.
Le cinéma, la télévision et les publicités ont popularisé les rituels liés aux marques avant l’apparition des communications numériques. Si vous n’avez jamais mangé d’Oreo, ou bu de Corona, vous savez néanmoins comment faire. Vous avez aussi en tête une façon bien précise d’aller chez Starbucks où vous pouvez lire ou travailler après avoir récupéré votre latte-caramel avec votre prénom écrit dessus. Plus largement, vous êtes capables d’associer certaines marques à certains évènements.

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Si le monde physique sait exporter simplement les rituels, c’est parce qu’ils sont d’abord culturels avant d’être communautaires. À l’inverse, le monde numérique a su créer des rituels de marque, mais ceux-ci sont nés des communautés puis sont devenus mainstream.

Naissances des rituels de marque à l’ère du digital.

De la même façon que la culture des marques depuis une centaine d’années a contribué à transformer notre manière de vivre les rituels. Internet apporte lui aussi son lot de changement. Comme dit plus haut, les rituels issus du monde physique ont été créés par la masse, sans liens communautaires. Internet depuis sa création a d’ailleurs facilité la création de communautés en effaçant les frontières.
Aujourd’hui chacun d’entre nous appartient à plusieurs communautés. Blogueurs, geeks, runners, gamers, foodies, etc. Chaque personnalité est entremêlée d’une affinité plus ou moins forte avec des communautés et les marques qui y sont liées. À présent nous sommes beaucoup de consommateurs identifiables dans une seule et même personne. Ce(s) consommateur(s) que nous sommes a des lieux très divers pour échanger : les réseaux sociaux. Facebook, Twitter, LinkedIn et même 9GAG ont permis de façonner des cultures propres à un persona. Dans ce sens, les échanges intercommunautaires ont permis de mettre en exergue des expériences communes dans la consommation de marques, et par conséquent de créer des rituels.
Si cet aspect théorique peut paraître vague ou peut-être bullshit, voici des exemples de rituels de marques nés des communautés sur Internet.

Le Star Wars Day.

May The Force Be With You. Ou plutôt devrait-on dire « May 4th Be With You » pour célébrer la saga culte pendant le printemps. Si l’histoire autour des origines de cette journée reste floue, la première véritable journée de commémoration a été organisée en 2011. L’expression a été empruntée à une célèbre phrase de 1979 félicitant Margaret Thatcher pour son élection en tant que Premier Ministre du Royaume-Uni : « May the Fourth be with you, Maggie. Congratulation ». La culture geek omniprésente sur Internet en 2011 aura permis à cette journée de devenir célèbre et de s’exporter. Aujourd’hui, nombreux sont les marques ou les médias à contribuer à cette journée avec chacun son clin d’oeil à la série Star Wars.


May the 4th Be with You: How Fans Celebrate Star Wars Day on Disney Video

Taco Bell et sa digestion.

Si cette chaine de fastfood est devenue si populaire aux États-Unis, c’est avant tout ‘grâce’ à la digestion de ses clients. Les médias sociaux ont participé à populariser cet aspect de la fréquentation de Taco Bell. Nombreuses sont les personnes qui partagent ou illustrent leurs expériences après leur passage dans un des restaurants. Si vous n’avez pas passé le stade anal, je vous invite à faire de plus amples recherches par vous même.

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« Netflix and chill. »

Alors que Netflix est né en 2009 aux États-Unis, les premières expressions liées à « Netflix & Chill » naissent dans la foulée. À la base utilisée dans une phrase et non comme expression, elle s’est popularisée pour symboliser une certaine façon de consommer le service. Une soirée Netflix & Chill représente à présent un binge watching impliquant relation sexuelle.

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Si les rituels liés aux marques font à présent partie intégrante de la vision que nous avons de certaines situations ou concepts, les autres rites n’échappent pas au numérique. Pour terminer en beauté, je pense que cette très bonne vidéo de Dirty Biology sur le deuil numérique est un très bon exemple.