À l’heure où les marques veulent attirer leur audience avec du contenu de qualité, la vieille réclame type display est-elle encore pertinente ? Autopsie d’un format âgé de 20 ans.

Il m’arrive parfois de désactiver le bloqueur de publicité AdBlock (seulement lorsqu’on me le demande, je l’admets). Je peux alors de nouveau savourer les plaisirs de la publicité display : les boutons aux couleurs criardes, les photos aguicheuses des « Filles de ta région » ou les questions du type « Combien voyez-vous de triangles ? »… Un bond en arrière de dix ans, en somme.

Mais n’accusons pas à tort le display qui a ses arguments.

Une frappe large et rapide

Du côté de l’annonceur, le display offre une audience souvent bien plus large que le réseau search.

J’ai comparé sur Google AdWords l’audience potentielle sur le réseau search et le réseau display avec les mêmes mots clés « vente voiture occasion ».

La différence est flagrante. Alors que le réseau search enregistre 9900 recherches par mois, le réseau display assure 500 millions d’impressions par semaine avec des annonces texte et image.

Réseau search Google

Sur Google, le terme « vente voiture occasion » est recherché 9900 fois par mois

Réseau display de Google AdWords

Le réseau display assure 500 millions d’impressions

L’autre point positif des campagnes display est la variété des critères sur lesquels un annonceur peut se baser. Mots-clés, centres d’intérêt, thèmes ou encore l’âge et le sexe de l’audience visée, là où seuls les mots clés sont disponibles pour le réseau search.

Le réseau display permet donc de « ratisser large ».

Le display permet également l’apport immédiat de visibilité.

On parle régulièrement de stratégies inboud et content marketing. Mais ces stratégies ne portent leurs fruits qu’au bout de plusieurs mois, voire années. Du temps précieux pour une entreprise qui vient de se lancer et qui a besoin de se faire connaître rapidement sur le web.
Seul le display offre cette vitesse de frappe (sauf si vous avez la « chance » de faire le buzz !)

N’oublions pas non plus le remarketing, véritable machine de guerre permise par le format. Proposer en image un produit pour lequel l’internaute a présenté un intérêt est l’une des techniques web marketing les plus efficaces à ce jour.

Tous ces points forts savent convaincre les annonceurs. Les investissements sur mobile ont ainsi décollé de 65 % au premier semestre 2015.

Les dommages collatéraux du display

Le display ne répond pas aux canons de la frappe chirurgicale, et ça n’est pas sans dommages collatéraux.

Le format aurait en effet tendance à déprécier l’expérience utilisateur. Il s’est dit au HubDay du 2 juillet 2015 que 39 % des publicités display ont un impact négatif sur les intentions d’achat.

Autre indicateur de cette gêne : la progression des bloqueurs de publicité. Selon une étude d’Adobe et de PageFair du 10 août 2015, 198 millions d’internautes utilisent AdBlock pour se débarrasser des publicités en ligne. Et ce chiffre ne risque pas de se tasser puisqu’il a progressé de 41 % en 12 mois.

La prépondérance des publicités gênant la navigation est une des raisons données par les internautes pour justifier de leur utilisation d’AdBlock.

Mais il n’y aurait même pas besoin d’AdBlock pour ne pas voir les publicités display… Une étude datant de 2005 a révélé l’émergence du phénomène de « banner-blindness ».

L’internaute dispose d’une capacité limitée de traitement de l’information. Il a également appris que les publicités sont la plupart du temps inutiles, voire indésirables. Ainsi, les bannières seraient cantonnées à la vision périphérique sans que le visiteur ne fasse l’effort de les traiter cognitivement : c’est le banner-blindness.

Mais si l’internaute considère inconsciemment les publicités comme inutiles et indésirables, à qui la faute ? Le principal problème du display ne serait-ce pas les annonceurs eux-mêmes ?

Qui n’est pas fatigué des « Perdez 20 kilos en 8 semaines », des jeux en ligne aux personnages féminins qui portent trop peu de tissu ou des « Vous êtes le 999 999e visiteur » ? Et parler du vide créatif de ces publicités n’est pas nécessaire.

Publicité display "Gagnez 260$ par jour"

Un exemple de publicité convaincante. J’ai cliqué.

Quant aux bannières et autres insertions qui ont un vrai produit à vendre, par expérience, elles sont loin d’être toujours pertinentes. C’est ici leur mode de diffusion qui pourrait l’expliquer.

Il faut rappeler que, sur AdWords, le réseau display peut s’appuyer sur des critères plus larges que les seuls mots clés. Les thèmes ou les centres d’intérêt sont des grandes catégories moins précises. Il en résulte mécaniquement une part de publicités servies non pertinentes.

S’y ajoute l’intention du visiteur. Ce dernier parcourt un site internet afin d’y trouver une information dans le contenu éditorial, non pas dans les bannières. Le display ne peut que difficilement prétendre apporter une information complémentaire.

Le display : irremplaçable ?

Alors que les investissements dans le display ne cessent de grimper, les internautes sont toujours plus nombreux à installer des bloqueurs de publicités… Un étonnant paradoxe qui relèverait l’irremplaçabilité du format ?

Mais doit-on dire que le display, en tant que format, doit être remplacé ? Évidemment non. C‘est la mauvaise exploitation d’un format qui le rend contre-productif.

Chaque maillon de la chaîne publicitaire doit l’utiliser à bon escient. Les éditeurs ne doivent pas abuser des emplacements pour ne pas perturber la navigation. Quant aux annonceurs, ils devraient faire preuve de créativité et écarter les publicités graphiquement agressives.

Le dernier maillon – et pas le moindre – est l’internaute.

Certains parlent de « responsabilité » et rappellent que la majorité du web est financé par la publicité. Un internaute ne voyant pas de publicités serait un « pirate », profitant d’un contenu sans participer au financement son éditeur. Mais il est évident que l’utilisateur n’acceptera de voir des publicités display que lorsque celles-ci seront à la fois pertinentes et correctement intégrées à sa navigation.

Et vous, croyez-vous en l’avenir du display ? J’aimerais avoir votre avis dans les commentaires !