Dans le cadre du Digital Transformation Forum du Web’14, nous avons eu l’opportunité d’écouter Sarah Wood, présidente fondatrice de la société Unruly (société leader dans l’analyse quantitative et la programmation de vidéos, et éditeur notamment du classement Unruly Viral Vidéos) revenir pour nous sur les tendances derrière les vidéos les plus virales en 2014.

Au moment de la présentation, les 3 vidéos les plus partagées de l’année étaient : Shakira La La La pour Activia, Puppy Love de Budweiser, diffusée lors du SuperBowl, et Devil Baby Attack, un stunt réalisé pour lancer un film d’horreur.

Ayant passé les films les plus partagés de l’année au filtre de ses puissants algorithmes et modèles d’analyse, Sarah Wood a partagé avec nous 13 faits marquants pour l’année écoulée :

1. 17,9% de la population globale sont des « super-sharers » :
ces internautes partagent une vidéo au moins une fois par semaine. À l’opposé, 38% ne partagent jamais rien.

2. Il en découle assez logiquement que 81,9% des partages émanent des super-sharers.
Ou mis en perspective autrement : 20% des internautes sont à l’origine de 80% des partages. Pression supplémentaire sur les marques et les agences pour la bonne diffusion des bons messages sur les bons médias et auprès des bons influenceurs…

3. … surtout quand on sait que 3 vidéos sur 4 sont désormais visionnées en dehors de Youtube.
Enjeux médias, RTB ou influenceurs viennent exiger une nouvelle forme de collaboration entre tous les acteurs de la chaîne (marques, agences de pub, agences médias, régies…).

4. Pour la première fois, les chiffres de partage social ont plafonné.
Alors qu’année après année on voyait la viralité croître exponentiellement, 2014 aura été la 1ère année où ses chiffres se sont tassés. Face à une offre de contenus tellement vaste que le mot pléthorique semble bien insuffisant, les enjeux d’émergence sont plus essentiels qu’ils ne l’ont jamais été.

5. L’émotion est devenue centrale en 2014.
Les gens partagent les vidéos qui provoquent chez eux des émotions fortes. Rire, surprise, peur, joie… Alors que les entreprises investissent chaque année un peu plus le web, les mécaniques de conviction fonctionnant sur des logiques rationnelles sont petit à petit abandonnées au bénéfice de l’émotionnel – du moins pour les vidéos qui ont été vues, appréciées et partagées en 2014.

6. L’humour et les « pranks » ont régressé.
Seulement 2 films dans le top 20 avaient pour levier émotionnel principal l’humour, contre 8 en 2013 (souvenez vous, des poneys danseurs ou du stunt Pepsi Max ).

7. Les grands sentiments ont dominé.
Si l’humour cédait le pas, c’était au profit de deux autres sentiments : d’un côté l’“exhilaration”, typique les années de grands événements sportifs rassembleurs (Activia, Nike…), et de l’autre des films tirant sur la corde sensible. Comme le pingouin de John Lewis, les soldats de Sainsburys ou le déjà mentionné chiot de Budweiser.

8. Activia La La La est devenue la publicité la plus partagée de tous les temps.
Avec ses 5,82 Millions de partages et ses plus d’1/4 de milliard de vues à fin novembre 14, elle a détrôné Volkswagen The Force qui régnait sur les classements depuis plusieurs années. Évidemment, elle réunissait plusieurs éléments gagnants : une chanteuse star déjà légitime sur l’événement après Waka Waka, une forme virale (clip vs. pub) et un événement global qui a lui même fait exploser tous les compteurs de conversations sur les réseaux sociaux.

9. La montée du « trackvertising ».
Les clips ont des scores de viralité bien supérieurs à ceux des publicités : 7% de partages en moyenne contre 2,1% pour les pubs, et une durée de vie supérieure. Pas étonnant qu’à l’instar de Danone, d’autres marques se soient lancées dans cette forme d’entertainment brandé : la très jolie vidéo The game before the game pour Beats by Dr Dre (444 384 partages) en est un exemple. Ou encore Pharell, Elton John, Stevie Wonder et les autres pour God Only Knows de la BBC (693 461 partages).

10. Les célébrités n’ont pas fait la différence.
De toute évidence Shakira n’est pas concernée. Mais un des constats de l’année 2014 – les algorithmes sont formels – c’est que célébrité n’a pas forcément égalé viralité en 2014. Un très décevant 85 000 shares pour Bob Dylan et Chrysler au Super Bowl vient appuyer le point d’un classement qui ne comporte que très peu de têtes d’affiche.

11. Une nouvelle tendance est née : le Fempowerment.
Si Dove est précurseur du courant depuis 2006, 2014 a notamment été marquée par une nouvelle manière pour les marques de s’adresser aux femmes. Vous avez sans doute vu passer Always like a girl ou le très grossier Potty Mouthed Princess de FCKH8 pour plus d’égalité entre les sexes. UnderArmour a aussi développé une très belle stratégie avec I will what I want, et même Pantene s’y est mis avec #ShineStrong.

12. Les grandes causes ont fédéré.
Un tiers des 20 vidéos les plus partagées avaient pour mission de sensibiliser ou récolter des fonds pour des grandes causes. Avec d’un côté des causes elles-mêmes bien sûr : Most Shocking Second a day, Potty-mouthed princesses ou Dear Future Mom. Mais les marques ont aussi pris la parole sur des thématiques de responsabilité sociale, par exemple Eyes on the road de Volkswagen. Et vous l’avez peut-être oublié mais Shakira pour Activia soutenait le World Food Program « providing school meals for children in need ». Bien sûr, on ne peut parler grande cause sans citer le phénomène le plus viral de 2014 : le Ice Bucket Challenge qui généra 1 milliard de vues sur Youtube et 10 milliards de vues sur Facebook (la vidéo la plus partagée ayant été celle de Charlie Sheen avec 573 982 partages).

13. La vitesse de partage a encore accéléré : 42% des partages de vidéo se font dans les trois premiers jours.
Les lancements de campagne n’ont sans doute jamais autant compté. Alors qu’en 2013 le chiffre était de 25%, cette accélération fulgurante est sans nul doute imputable pour partie au récent avènement du mobile. Mais ne nous voilons pas la face, l’infobésité évoquée au point 4 est-elle aussi en cause : sitôt mis en ligne, sitôt oublié pour le contenu suivant. Les marques vont devoir de manière croissante inventer de nouvelles manières de garder le lien avec leur papillonnante audience.

Le métier de Sarah Wood, c’est la data, l’analytics, l’analyse. Et pourtant lorsqu’elle parle des recettes de la viralité, elle ne parle que de critères émotionnels. Encore plus dans les années à venir que dans les années écoulées, la créativité sera reine pour espérer émerger dans le brouhaha. L’ère de l’interruption est bien morte.

2015, année du content et de la créativité ?