L’entreprise Rocket Lab, spécialisée dans le lancement de nano satellites, prévoit de réaliser la toute première mission privée vers Vénus en 2023. Si elle y parvient, elle deviendra la première firme privée à envoyer un vaisseau au-delà de la Lune.

Qui est Rocket Lab ?

Rocket Lab est surtout connue du grand public pour sa technique peu singulière visant à rendre ses lanceurs réutilisables : la société souhaite les récupérer à l’aide d’un hélicoptère après leur mission afin de les ramener sur la terre ferme. L’entreprise américaine a néanmoins réalisé d’autres choses avec plus de 140 satellites lancés à son actif, et notamment CAPSTONE pour la NASA, dont l’objectif est de vérifier la stabilité de l’orbite prévue pour la future station spatiale Lunar Gateway conçue dans le cadre du Programme Artemis.

Rocket Lab travaille également sur un autre lanceur qu’Electron, sa petite fusée de 18 mètres, qui sera baptisée Neutron et en mesure de transporter des charges utiles bien plus conséquentes que son prédécesseur. C’est toutefois Electron que la société veut exploiter pour sa mission autofinancée vers Vénus, qui consiste à y envoyer une petite sonde d’environ 20 kilogrammes et qui devrait marquer un tournant dans l’histoire du secteur spatial privé.

La planète Vénus.

La planète Vénus est plus proche de la Terre que Mars. Pourtant, la dernière mission vers notre planète voisine remonte à plus de 30 ans. Image : NASA/JPL-Caltech

Une mission courte mais significative pour le spatial privé

Comme l’explique Ars Technica, Electron propulsera la sonde sur une orbite de 165 km au-dessus de la Terre, où l’étage supérieur à haute énergie de la fusée, baptisée Photon, effectuera un certain nombre de brûlages pour élever l’orbite du vaisseau spatial et atteindre la vitesse de fuite pour envoyer la sonde dans l’atmosphère de Vénus (à une altitude comprise entre 48 et 60 kilomètres) quelques mois plus tard. Une première tentative est prévue en mai 2023, et une autre fenêtre serait envisageable en janvier 2025.

La sonde en question contiendra du matériel scientifique d’un kilogramme, et plus particulièrement un néphélomètre autofluorescent, ainsi qu’un instrument permettant de détecter les particules en suspension dans les nuages. L’objectif est de rechercher des substances chimiques organiques dans les nuages et d’explorer leur habitabilité. La sonde passera environ 5 minutes et 30 secondes à traverser la haute atmosphère, puis continuera normalement à transmettre des données au fur et à mesure de sa descente vers la surface. Sur son site Internet, Rocket Lab détaille sa démarche :

« Des recherches suggèrent que Vénus était autrefois une planète habitable similaire à la Terre. Selon une étude réalisée en 2019 par le Goddard Institute for Space Studies de la NASA, Vénus aurait pu avoir des océans peu profonds à sa surface pendant deux à trois milliards d’années, ce qui aurait permis de maintenir des températures comprises entre 68 et 122 degrés Fahrenheit (Ndlr : 16 et 50 degrés Celsius). Mais il y a environ 700 millions d’années, un événement de résurgence a libéré du dioxyde de carbone dans l’atmosphère, transformant Vénus en une planète dangereuse et inhospitalière où les températures atmosphériques atteignent 1 000 degrés Fahrenheit (Ndlr :5 40 degrés Celsius) ».

Pourquoi Vénus ?

La dernière mission vers Vénus remonte à 1986. En cause, les conditions très difficiles à la surface de la planète, considérée comme notre jumelle maléfique de par sa proximité et ses similarités avec la Terre en termes de taille et de masse. D’ailleurs, une étude récente a démontré qu’une activité tectonique avait été décelée sur Vénus, la Terre étant la seule planète où ce phénomène a été détecté avant cette découverte.

Vénus continue de fasciner la communauté scientifique, qui cherche à savoir pourquoi les conditions de vie y sont devenues si extrêmes, alors qu’il est possible qu’elle ait, par le passé, été habitable. « La mission est la première occasion de sonder directement les particules du nuage de Vénus depuis près de quatre décennies. Même avec les contraintes de masse et de débit de données et le temps limité dans l’atmosphère de Vénus, une science révolutionnaire est possible », indique un article qui décrit l’architecture de la mission. Trois missions, deux de la NASA et une de l’ESA, se préparent en outre pour aller étudier notre planète voisine dans les années 30.

De son côté, Rocket Lab pourrait marquer l’histoire du spatial privé en se rendant sur une autre planète mais surtout, démontrer l’attrait de son lanceur aux scientifiques du monde entier et ainsi révolutionner l’exploration low cost de l’espace.